On s'aime !
Dimanche 17 mai, Saint-Lô
Mon cou me fait souffrir terriblement. J'avale les médocs depuis deux jours mais rien n'y fait. Sur les recommandations du sympathique Docteur R., je porte cette minerve blanche qui me serre le cou mais me soulage tellement... C'est sûr, je ne peux pas me rendre à la Marche Laurette Fugain, qui partira tout à l'heure, à 300 kilomètres de chez moi. J'enverrai tout à l'heure un message à Stéphanie Fugain pour m'excuser : j'y tenais tellement et elle le sait. Ma Lucie Bernardoni et moi y avons participé anonymement main dans la main deux années de suite, et nous en gardons tous les deux -je crois- des souvenirs gravés à jamais. Des sourires, de l'amour, des chansons et des couleurs, beaucoup de couleurs. Un combat honnête, mené par une femme honnête et si forte... J'en serai l'année prochaine
Lundi 18 mai, Saint-Lô
Je connais déjà le planning de ces deux premiers jours de la semaine : je les consacrerai au défilé du Salon du Chocolat que j'orchestrerai artistiquement en choisissant minutieusement la vingtaine de comédiennes, actrices ou chanteuses qui défileront en robes chocolatées pour soutenir La Voix de l'Enfant.
Si la tâche n'est pas simple, je sais pourtant que je relèverai le défi. Les premiers "oui" seront pour aujourd'hui, j'en ai l'intime conviction. Plus de dix ans passés dans ce métier font que les contacts sont simplifiés. Ceux qui m'aiment continueront de m'aimer et de m'aider. Je sais à qui je peux demander, maintenant, sans jamais me tromper.
Mercredi 20 mai, Saint-Lô
Incroyable ! Plus aucune trace des globules atypiques de maman sur sa dernière analyse de sang. Si ses plaquettes font défaut, jamais nous n'avions pu lire jusqu'alors de tels résultats. Maman est émue mais reste guerrière et vaillante : le combat est loin d'être terminé et elle le sait. Deux cures de chimiothérapie, une opération de la rate et une auto-greffe... Que le chemin semble long, encore. Mais moins ombragé que tout le monde le pensait. Je reste moi aussi très vigilant : la particularité de la maladie de maman est qu'elle peut être récurrente. Ce que je ne souhaite pas une seconde pour elle et nous qui l'aimons si fort.
Coup de fil d'Auren, inquiète par son concert Parisien à l'Européen qui approche. Dans huit jours elle sera sur scène et je viendrai la rejoindre pour chanter "Amsterdam" enregistrée en duo sur son premier album. Auren flippe, s'angoisse, se ronge les ongles et ne fait pas semblant. Ca me rappelle le trac d'avant-scène, que j'oublie ces temps-ci... mais que je retrouverai bientôt. J'espère pour elle que les curieux seront au rendez-vous et que ceux qui me suivent la suivront.
Jeudi 21 mai, Internet-Land
Je suis atteint par la fièvre Facebook. J'y retrouve des gens magnifiques, certains perdus de vue. On échange quelques mots et on "s'aime". Le réseau de socialisation m'a conquis, je m'en amuse mais suis déjà persuadé que ça ne durera pas.
Le QG nous bloque ici dans la Capitale des Ruines, tout près des Remparts. J'aime y flâner l'après-midi, dans ce lieu que j'admire tellement quand j'y vais par intermittence. Ca sent la famille, les vacances presque et les touristes poussent la porte et s'étonnent de nous voir "en vrai". Etrange relation qu'instaure la télévision entre eux et nous. Je remercie systématiquement chaque voyageur d'avoir eu l'idée de s'arrêter ici. Mais ici c'est "un peu chez vous" me dit cette maman, fraîchement débarquée des Landes avec son mari et ses enfants. Elle a raison. Agréables échanges, simples comme la Province, et certainement comme nous.
Vendredi 22 mai, Pirou
Nous avons choisi Pirou pour nous évader un peu et profiter de ce ciel au bleu superbe. Pourquoi Pirou ? Je n'en sais rien au fond. Peut-être pour être un peu plus près de mes jeunes années, et des fou-rires qui résonnaient dans les dunes. Je parie qu'un coup de soleil osera frapper mon petit nez et le fera rougir, ce soir au coucher. Il n'y a pas grand monde ici, la destination est idéale ; quelques enfants jouent plus loin. Je déterre de mes grands doigts quelques puces de sable indomptables et fragiles. Je n'ai plus d'âge, je n'ai plus d'heure. Je respire juste la vie.
Dîner avec maman qui oublie de sourire, la tête dans son assiette. J'ai l'impression qu'elle se renferme ou qu'elle s'ennuie. Qu'il est difficile de se comprendre parfois.
Samedi 23 mai, Saint-Lô
Cette musique dans la rue qui me sort prématurément de mon sommeil, je n'en peux qu'on me l'impose. Les mêmes chansons, toujours, aux mêmes heures : infernal. Puis intervient ce ballet de klaxons, un mariage forcément. Je hais ces blérots qui dérangent ceux qui se fichent autant que moi de leurs épousailles. J'ai toujours préféré les gracieux ballets de Noureev aux ballets balourds de sans-gênes. Question d'éducation sans doute. Me voilà d'une humeur de chien : c'est un samedi qui commence bien.